dimanche 12 octobre 2025

Les Bestioles - Hala Moughanie

 


Comment réagir lorsque l’on est un miraculé sorti presqu’indemne de l’explosion des silos dans le port de Beyrouth, le 04 août 2020 ?

Le narrateur, un commerçant d’un certain âge, est frappé par cette immense explosion alors qu’il rentre chez lui. Protégé par la cage d’escalier, il va perdre son œil, ce qui n’est pas une urgence pour les hôpitaux qui voient affluer un grand nombre de blessés graves et de corps sans vie.

En état de choc, il va errer dans ce quartier dévasté, semé d’éclats de verre, de corps sanguinolents, de cadavres. En pleine sidération, il ne croit pas à la version officielle d’un accident dans la manipulation d’un feu d’artifice qui aurait entrainé l’explosion d’un énorme stock de nitrate, mais reste convaincu que des avions israéliens, qu’il surnomme les bestioles, ont volontairement fait exploser le port.

S’approchant de la folie, il finit par se persuader que le monde entier souhaite la destruction du Liban et il laisse libre cours à ses propos xénophobes, rejetant toute forme d’aide de qui que ce soit, et se complaisant dans une vision complotiste des choses.

Mais n’est-ce pas l’aboutissement de nombreuses années de conflits avec les pays voisins (Israël, la Syrie) ou les différentes factions politico-religieuses qui fractionnent ce pays devenu ingouvernable. Ce traumatisme fait resurgir les images néfastes de son passé, lorsqu’il utilisait son fusil pour tuer d’autres libanais, lors de la guerre « fratricide ».

Hala Moughanie nous trace le portrait de cet homme qui a perdu le peu qui lui restait, son épicerie, ses voisins, ses espoirs. Son épouse, il l’a perdue depuis longtemps, mais il ne veut pas en parler.

Ce court roman écrit sur la lame du scalpel, aux mots aussi violents que les situations décrites, peut nous laisser au bord du chemin. Peut-être faut-il être libanais pour saisir les nuances à travers les propos du narrateur.

Bref, un roman très noir, qui gomme l’idée d’un Liban terre de partage et de tolérance.

Merci à Babelio de m’avoir permis de découvrir ce roman et merci aux Editions Elyzad pour leur envoi.

lundi 5 mai 2025

Manipulations DIAboliques


Si les manipulations des populations ressemblent fortement à de grands sacs de nœuds, il ne faudrait pas qu’elles se transforment en de grands sacs à puces !

Myrtille, la fille d’un neurologue qui a repris son travail après un long coma suite à un accident de vélo il y a sept années, retrouve une clé USB appartenant à son père. Elle l’avait rangée et oubliée après l’accident de ce dernier. Cet objet lui revient en mémoire, lorsque son paternel lui annonce qu’il vient de terminer un roman qui reprend les actions mais aussi ses doutes et ses questionnements consécutifs à son traumatisme crânien. Après avoir visionné ce support informatique et constatant que ce que prétendait son père est  vrai, elle décide d’en savoir plus sur ce sujet…

 A travers une écriture fluide et dynamique grâce à de nombreux dialogues, Elisabeth HOCLET nous emporte dans le monde secret de la recherche sur le cerveau et des conséquences qui en résultent. Ce qui pourrait être un immense progrès pour le bien-être des patients peut tout aussi bien, devenir le pire cauchemar pour tous les individus lorsque le profit et la volonté de domination guident les laboratoires chargés de mettre au point ces dernières technologies.

 Comme dans les tableaux du Caravage où la noirceur finit toujours par altérer (ou renforcer) la lumière, la malfaisance finit toujours par détruire les bienfaits du progrès, et les aventures de Myrtille nous permettent d’ouvrir nos œillères et de réfléchir au futur que nous souhaitons pour l’humanité.

Ce roman est la suite de « Le Mal Entendu »,  premier livre écrit par Elisabeth HOCLET. On retrouve avec quelques années de plus, les différents personnages. Mais, si comme moi, vous n’avez pas lu ce premier opus, cela ne vous retirera rien à la bonne compréhension de l’histoire.  

Bref, un livre pour passer un bon moment et qui ouvre une vision réaliste sur certains dangers de la recherche scientifique.

Un conseil, cessez  de vous frapper le front en criant « Euréka», lorsque vous avez trouvé quelque chose. On ne sait jamais…

(Cette chronique est garantie sans IA !)

jeudi 17 avril 2025

Rosa Candida

 

Rosa Candida

Audur Ava Olafsdottir
(Editions Zulma)


Et si le père était une mère comme les autres ?

L’Islande est une terre mystérieuse, où le noir de la lave durcie rencontre l’écume d’une mer agitée. Pays de silence et de sentiments souvent tus, où les habitants ont tendance à ne pas vouloir interférer dans la vie de leurs concitoyens. Chacun doit assumer ses joies, ses émotions et ses tristesses sans incommoder son voisin.

C’est peut-être pour fuir ce monde qui, pour des sudistes comme nous semble déprimant, qu’Arnljotur, un jeune homme qui se cherche, décide de prendre la route et rejoindre le continent.

Quitter cette maison qui porte en elle à la fois le bonheur de l’enfance et de la jeunesse mais aussi la tristesse de la perte de sa mère, celle avec qui il partageait sa passion des roses.

Quitter ce père déboussolé par la mort de son épouse, qui l’oppresse à trop vouloir subvenir à ses envies et qui jusque là, s’est davantage soucié de son frère autiste que de lui-même.

Quitter enfin Anna, jeune femme amie de son meilleur ami, avec qui il a fait l’amour, une fois, et qui lui a donné une petite fille. Sans nier sa paternité non désirée, il ne se sent pas de taille à assumer complètement son rôle de père.

Il veut juste un peu de temps pour se construire afin de vivre sereinement sa vie et ses responsabilités.

Après être déjà parti pour des campagnes de pêche sur de gros bateaux, c’est en voiture qu’il souhaite rejoindre un lieu ensoleillé du sud de l’Europe, afin de restaurer une vielle roseraie tombée en désuétude, située dans un monastère.

Deux parties dans cet ouvrage :

D’abord, une sorte de road movie au ralenti (il faut dire que sa voiture n’est pas toute jeune). Il descend vers le sud, vers l’inconnu en se posant de nombreuses questions, en particulier autour de l’amour et du rapport homme/femme. Ne trouvant pas les réponses à ses questions, il finira, une fois arrivé à destination, à questionner la personne qui sera son référent durant son travail à la roseraie du monastère, un moine cinéphile qui trouve toujours un bon film pour illustrer ses réponses. On ne sait pas trop où veut nous emmener l’autrice dans cette première partie. Il faut un peu de patience au lecteur et tenter de savourer un humour très… nordique !

Puis arrivent Anna et sa fille dans le village.

A partir de là, le livre devient lumineux. La relation qui s’instaure entre le père, la mère et l’enfant est poétique, amusante et particulièrement bien observée. On oppose souvent le lien maternel, indispensable, au lien paternel, souvent considéré comme accessoire. L’auteur nous démontre, par petites touches, que ce n’est pas le cas, que chacun va apporter quelque chose d’essentiel à la construction de l’enfant.

C’est un livre tout en atmosphère, où la lenteur du récit, le calme, le style posé et la sérénité révélée dans la seconde partie du livre, ne laisse pas le lecteur indifférent. Dans un monde surexcité, où tout doit aller très (trop) vite, cela fait du bien de faire une pause.

Merci Madame Olafsdottir.

vendredi 11 avril 2025

Anniversaire

 

Il y a des âges où fêter son anniversaire est important
Jusqu’à 10 ans, c’est la curiosité qui nous aiguillonne
Jusqu’à 20 ans, c’est l’avenir que l’on dessine
Jusqu’à 50 ans, c’est la plénitude que l’on confirme
Jusqu’à 60 ans, c’est le décompte avant la retraite
Après 65 ans, il n’est plus utile de compter les années car on est libre !
Enfin, libre jusqu’à la fin qui se rapproche trop vite.
Parfois, cela se transforme en une compétition de longévité
Et il semble de mauvais aloi de tenir ce décompte
Aussi, prenons chaque jour comme il vient
Sans stress ni ambitions absurdes
Et lorsque le dernier pointera son nez
Nous pourrons dire que nous en avons bien profité